Hormis les sociétés par actions, il n’est pas rare que certains associés aient recours à des biens qu’ils détiennent en commun avec leur conjoint marié légalement, pour réaliser leurs apports en société, lors de la création de celle-ci (apports en numéraire, apports en nature ou apports en industrie).
Dans ce cas, des précautions doivent être prises, au risque de se trouver devant le conjoint d’un associé qui :
- Tout en réclamant la moitié des parts sociales qui ont été acquises par celui avec qui il est marié, en contrepartie des biens communs apportés par ce dernier, demande une cession des parts du conjoint pour pouvoir jouir des droits qui y sont associés.
- Ou qui peut tout simplement dénoncer l’apport constitué, ce qui peut entrainer un transfert de propriété face à la communauté de biens ou même la Cour de cassation.
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comparerDe quels apports parle-t-on ici ?
Contrairement aux biens propres à chaque époux, l’on appellent bien communs, l’ensemble des biens acquis dans un mariage conclu sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, par les deux époux.
La problématique qui nous est soumise ici est relative à l’utilisation de ce type de biens par un des époux en guise d’apports effectués pour la réalisation du capital d’une société, qui n’est pas une société par actions. En effet, dans ce type de société, le problème ne se pose pas, car c’est uniquement l’époux qui a réalisé l’apport, à qui est reconnue la qualité d’associé que ce soit des apports en numéraire, des apports en nature ou des apports en industrie.
Ce qui n’est pas le cas pour les apports à SCI, n’étant pas une société par actions.
Quelles sont les formalités à suivre pour effectuer des apports de biens communs et quelles sont les conséquences d’un tel apport, lorsqu’il est effectué ?
Formalisme de l’apport d’un bien commun
Les statuts de la société doivent prévoir, outre la cession de parts pour le conjoint-collaborateur, la possibilité des apports de biens communs (apport en numéraire ou apport en nature) en guise d’apports en capital.
L’époux qui effectue des apports à travers des biens communs est tenu d’en informer son conjoint et d’apporter la preuve de l’autorisation dudit conjoint dans l’acte d’apport. Une mention de cette opération doit être effectuée dans les statuts lors de la création de la société ou dans l’acte d’augmentation de capital (PV de l’assemblée générale extraordinaire), en outre pour les organes compétents comme le greffe du tribunal.
Le défaut de respect de ce formalisme entraine automatiquement la nullité de l’acte d’apport, sauf
- Si l’opération est ratifiée ultérieurement par l’époux de l’associé en cas de défaut d’information et/ou de mention ;
- Si les statuts sont amendés en conséquence, si cette option n’y avait pas été prévue auparavant.
En cas d’apport en nature, il conviendra de respecter les règles de nomination d’un commissaire aux apports.
Les conséquences d’un tel apport
On peut distinguer trois cas :
- Le conjoint revendique la qualité d’associé,
- L’époux y renonce,
- L’époux dénonce l’opération.
Le conjoint revendique la qualité d’associé
Dans le premier cas, c’est-à-dire lorsque le conjoint revendique la qualité d’associé pour la moitié des parts souscrites ou acquises, il doit notifier expressément par un acte écrit sous l’audit d’un commissaire aux apports, son intention d’être personnellement associé, ce qui conduira à une cession des parts de l’époux pour son conjoint selon la communauté réduite aux acquêts. Mais lorsqu’un agrément de nouveaux associés est prévu, deux cas sont à prévoir :
- Si la revendication a lieu au moment de l’apport, l’agrément ne pourra pas être opposé à l’époux qui désire devenir associé, car l’agrément de l’apporteur vaut également pour son époux.
- Si la revendication a lieu ultérieurement, l’agrément personnel doit être obligatoirement obtenu, sinon l’apporteur sera seul associé pour la totalité des parts sociales souscrites grâce aux biens communs.
Le conjoint renonce à la qualité d’associé
L’époux a aussi la possibilité de renoncer à son droit de revendication de la qualité d’associé pour les apports effectués en utilisant des biens communs, en établissant un écrit qui rendra cette renonciation définitive sans aucune possibilité de retour en arrière face aux organes compétents comme le greffe du tribunal. Cela peut entrainer un transfert de propriété en bien propre face à la communauté de biens et à la Cour de cassation.
Le conjoint dénonce l’opération
Si l’opération est dénoncée et que l’époux de l’apporteur produit la preuve d’un défaut d’autorisation de sa part pour ses biens propres, l’apport est purement et simplement réputé nul, qu’il s’agisse d’un apport en numéraire ou d’un apport en nature. Dans ce cas l’augmentation de capital sera aussi annulée par l’assemblée générale extraordinaire sous l’audit d’un commissaire aux apports.
Qui détient la qualité d’associé lors d’un apport de biens communs dans une SARL ?
La qualité d’associé appartient à l’époux ou l’épouse qui effectue l’apport avec les biens communs du couple.
Cependant, le conjoint non apporteur peut, sauf renonciation expresse, demander à bénéficier de cette qualité pour la moitié de la valeur des parts de la société détenue par le conjoint associé. Le conjoint non apporteur souhaitant détenir la qualité d’associé a la possibilité de la revendiquer lors de l’apport des biens communs ou au cours de la vie de la société.
Si la demande de détention de qualité d’associé se fait lors de l’apport, l’accord des autres associés pour l’entrée de nouveaux associés vaut pour les deux époux. Dans le cas où la revendication se fait au cours de la vie de la société, il faut se référer aux clauses d’agrément prévues par les statuts. Le demandeur ne participe pas au vote d’agrément. Ses parts ne sont pas non plus prises en compte dans le calcul du quorum et de la majorité. En cas d’absence de clauses d’agrément, la qualité d’associé ne pourra être refusée au conjoint non apporteur.
En cas d’assignation de divorce, le conjoint ne perd pas sa qualité d’époux ou d’épouse. Par conséquent, il ou elle peut encore revendiquer la qualité d’associé, mais au plus tard à la date de liquidation de la communauté.